Pourquoi
j'ai plus de forces ? Pourquoi je me sens mal ? Pourquoi je
déprime et pourquoi je suis autant révoltée à l'intérieur de
moi ? Pourquoi je me suis sentie mal aimée ? Pourquoi j'ai
été si complexée ? Pourquoi ? Pourquoi ? Tous ces
« pourquoi » se bousculent dans ma tête, en vagues
successives qui s'éloignent et repartent comme le ressac de la mer.
Un coup ils m'éclaboussent de leurs points d'interrogations, un coup,
ils m'offrent un peu de répit, mais de trop courte durée, revoilà
le flux des « pourquoi » et puis ce bruit en sourdine
même lorsque la déferlante est passée…
Dans
une époque en plus où les gens passent leur temps à se chercher.
Comme si c'était plus inné. On se cherche. On cherche qui on est,
qui les autres veulent qu'on soit, qui on sera. On cherche et on se
rate, on se croit comme ci et en fait, on est comme ça. Et comme on
se trouve pas, ben on trouve encore moins les autres, qui n'arrivent
du coup pas à savoir qui on est. On se cherche même parfois
tellement trop, qu'on se trouve là où on n'aurait jamais dû se
trouver. On est dans une époque où les gens se ratent le plus. Les
psys sont friands de cette époque. Les gens sont perdus à tous
points de vue, et sont persuadés que pour aller mieux, il faut se
trouver. Alors on confie le soin de le faire à une autre personne
que soi. Paradoxe ? Ça prend du temps, ça coûte cher et on
passe parfois une vie à se chercher sans se trouver. D'ailleurs qui
peut dire : "Moi, je sais exactement qui je suis, je me suis
trouvé." Pas grand monde, je pense. On finit toujours pas découvrir
des choses sur soi et donc d'en conclure qu'on se connaissait pas si
bien que ça. La seule chose que je sais c'est que je ne sais
rien.
Bref.
On a quand même le droit de vivre même si on s'est pas trouvé.
D'ailleurs la plupart des gens vivent bien sans s'être trouvés. On
aurait de toute façon besoin de plus d'une vie pour se trouver
réellement.
C'est l'insatisfaction qui fait que les gens se cherchent sans arrêt, la
sensation que ça pourrait être mieux, que la perfection n'est pas
atteinte. Alors, on lâche tout, et on recommence autrement. Et au
bout du compte, on n'avance pas.
Lâcher
prise avec cette idée de perfection et d'insatisfaction. On est bien
là où on est. Mais la société nous fait sans arrêt miroiter des
nouvelles choses, des nouveaux modes de vie... Alors on s'y engouffre et on s'y
perd, s'inventant à chaque fois autrement... Et en oubliant
totalement ce qu'on est au fond. On pense savoir ce qu'on veut, alors
on passe son temps à essayer d'obtenir ce qu'on croit vouloir et on
se rend compte qu'au fond, on n'en avait pas tant besoin que ça, qu'on
aurait dû voir les choses autrement.
J'ai donc commencé à essayer de me trouver, moi aussi.
J'ai
tout fait exploser à cause de ce quelque chose qui n'allait pas,
quand j'avais 19 ans. J'ai eu le courage de faire un pas de côté
pour ne pas m'enfoncer dans le pire encore, puis, je me suis perdue,
en essayant de me retrouver.
Pour
sortir de moi ce blocage, ce truc qui capte mes émotions, qui les
empêchent de s'exprimer, qui me rend renfermée, asociale, je suis
allée voir des psychologues, j'ai même fait du rebirth. J'ai
rencontré des gens formidables, mais j'ai dû arrêter, car j'avais
l'impression de dépenser tous mes sous et que rien ne progressait.
J'en ai retiré certaines choses tout de même : j'ai découvert le pouvoir guérisseur et apaisant de
la respiration ; j'ai trouvé des espaces de
parole, ou je pouvais exprimer mes frustrations, mes doutes. Ce qui a
permis aussi que je laisse en paix mes proches, comme ma maman et mon
papa, mon frère, qui ont longtemps été le réceptacle de ma
difficulté de vivre. Je m'en excuse et leur demande pardon. Sans le
vouloir je sais que je les ai affaiblis. Je leur ai pompé un peu de
leur énergie, j'ai souvent pris beaucoup de place, sans voir que pour
eux non plus, la vie n'était pas si facile…
Ils m'ont vraiment témoigné un grand amour et une attention sans
faille et cela, je n'aurai jamais assez de toute une vie pour les
remercier. Merci à mon grand frère de ne jamais avoir lâché sa
petite sœur, de l'avoir
encouragée, portée à bout de bras.
Puis, je me suis inventée.
J'ai vécu dans un avenir fantasmé, qui ne me
correspondait pas : première année de
médecine, assistante sociale,
formatrice, professeur. Je me suis inventée
intelligente, sociale, et puis maternelle et au bout du compte, je ne suis rien de tout cela. Chômeuse névrosée.
Et je
continue à me réinventer, pas par schizophrénie, mais par besoin de
conserver un minimum d'énergie, d'espoir. Subterfuges pour me voiler la face et ne pas
me rendre compte que je suis dans une impasse.
Mais je commence à
être lasse, épuisée, terrassée. La réalité, la fatalité a
raison de moi petit à petit. A l'heure où j'écris ce message, je m'invente écrivain dans un nouveau sursaut d'espoir, mais c'est encore une impasse.
Je me suis peut-être trop inventée et je suis passée à côté de moi. Il n'est plus temps de m'inventer, il faut agir, le temps passe...
Au cœur d'une écriture parfaite, un lapsus "D'ailleurs la plupart des gens vivent bien s'en s'être trouvé" que je ne juge ni ne comprends, mais qui ne peut être innocent.
RépondreSupprimerMerci Eric pour ton nouveau commentaire. Eh bien non, ce n'est pas un lapsus, mais bel et bien une faute d'orthographe, que je m'en vais rectifier de suite ! Merci. ;-)
SupprimerTon blog me touche beaucoup . Moi aussi j'ai connu les tourments de la souffrance psychique : dépression , phobie sociale , etc . J'étais assez beau mec, très attiré par les femmes mais tellement timide : j'écartais des femmes intéressées par peur , j'ai perdu mon pucelage tard: 21 ans . Les nanas que j'ai connues n'ont jamais compris ma "sensibilité" : pour elle un homme c'est fort ou c'est une "lopette" . Elles me disaient que j'étais bien monté comme mec , flatteur, mais j'aurais préféré en avoir une plus petite et ne pas être malade . Les médocs m'ont rendus moche (ou du moins je me vois comme ça) et j'ai perdu ma confiance en moi . Jean .
RépondreSupprimerBonjour Jean,
Supprimermerci d'être passé par là. Est-ce vraiment une maladie ou bien plutôt un manque de confiance ? ;-)Je me reconnais un peu dans ce que tu dis et pourtant, j'ai l'impression que ça se travaille... Même si c'est bien difficile, je le sais. J'ai la sensation qu'avec les bonnes personnes, on peut avancer et prendre confiance en soi. ;-) Moi aussi comme je l'ai écrit quelque part, j'ai eu une sexualité tardive et cahotante. 24 ans ! Je te bats ! Et c'est pas facile de commencer à cet âge-là et du coup la suite s'en ressent... la confiance pour aller vers l'autre ou se laisser séduire, adopter une attitude d'ouverture plutôt que de renfermement sur soi... Pour ma part, j'ai nourri longtemps des complexes, une timidité et la sexualité m'a aidée à les dissiper un peu, mais tout cela laisse des traces et c'est super difficile de s'en débarrasser pour de bon...
Je te soutiens de tout cœur dans ton combat, et suis persuadée que tu vas trouver un compromis avec ta timidité et cette sensation d'être malade. Moi, on m'a dit qu'il fallait que j'en fasse une force, que j'étais hypersensible... alors je médite là-dessus. ;-) (un homme sensible a beaucoup de charme)
Bises,
lfqrt
Hélas lfqrt, je suis bel et bien malade, et diagnostiqué par un psy . Oui ce décalage est pas simple , ma dernière partenaire était une personne très expérimentée et je ne me sentais pas à la hauteur ! En tout cas, vous écrivez bien :) . Comme vous , mon frère m'aide énormément . J'ai eu des parents aimants mais sans doute que j'étais un enfant fragile : bonne élève mais très isolé . Ado, je suis tombé en pathologie car cet équilibre fragile ne tenait plus . Je suis en psychothérapie . Jean.
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