Prologue ou Histoire de la fille qui ratait tout

Je ressens le besoin d'écrire mon histoire, de me raconter, comme si j'avais besoin des mots pour me sortir d'une impasse, d'un mal être, d'une incapacité à aller de l'avant. J'ai l'impression d'avoir fini un cycle, d'avoir bouclé une boucle, et d'en avoir saisi le mécanisme, de cette boucle, comme un système complexe et bien rodé dont on finit par percevoir le fonctionnement.

Et à trente ans – trente deux exactement – je crois que je peux le dire, j'en suis là, à ce moment de ma vie où je commence à comprendre mon fonctionnement. J'ai découvert qui j'étais : la fille qui rate tout.

vendredi 26 octobre 2012

Dépression - Comment j'en suis arrivée là

J'étais une élève brillante jusqu'au secondaire. Poussée devant la porte des grandes écoles. Et l'angoisse, le mal être, le manque à être m'ont assaillie et plaquée au sol. J'ai tout lâché. J'ai changé de cadre comme on change d'air pour pouvoir respirer, mais je me suis perdue en route. J'ai cherché quelque chose que je n'ai jamais trouvé. Cela fait plus d'un an que je suis au chômage. J'ai travaillé dans diverses institutions, dans le secteur social, j'ai tenté une incursion dans l'éducation nationale, me suis cherchée dans la fonction publique, ai suivi des formations, ai fait un bilan de compétences, tout cela pour finir chômeuse. Je n'ai pas travaillé à temps plein plus d'un an d'affilée. J'y arrive pas.
Dans les premiers temps, je me suis maintenue la tête hors de l'eau et puis petit à petit au fur et à mesure que j'encaissais les échecs, j'ai sombré dans la dépression.

Mon problème ? Le même que beaucoup de gens avec l'énorme défaut de ne pas savoir faire de compromis avec la vie.  Je manque de confiance en moi, j'ai un tas de peurs infondées qui me pourrissent la vie. Mais moi, dès que je souffre, je pars. Je suis donc beaucoup partie. Et toujours à la case départ.

Tu fais un pas de côté dans cette vie-là, tu meurs. Y en a tellement qui sont prêts à te remplacer, à briguer la place à laquelle tu aurais pu prétendre… Il faut se battre qu'on nous dit à longueur de temps. Y en a qui se battent. Moi, je sentais que si je me battais, j'y laisserais trop de plumes. Alors je me suis pas battue. J'ai pas conquis ma vie. J'ai laissé la vie me conquérir, faire de moi ce qu'elle voulait, au gré du temps qui passait… La peur au ventre, celle de vivre ma vie. Et la vie m'a engloutie dans son ventre ronronnant, m'offrant ses plaisirs furtifs, ses cataplasmes de choses pour oublier, et ses tentatives, tout le temps rembarrées, de vivre ma vie. Et puis, elle m'a mâchée, mâchée, jusqu'à ce que j'en oublie qui j'étais, que j'avais eu des envies, des rêves, faisant défiler le temps à toute allure, pour que je n'ai pas trop le temps de regarder en arrière…

Je crache sur l'école, les concours, les diplômes, tout ce qui m'a pourri la vie pendant de si nombreuses années et m'a enterrée vivante. J'en peux plus de ces cohortes de bons élèves, de surbrillance des egos, prêts à se marcher sur la tête pour arracher les bonnes places, les places à plastronnage et alignement de zéros. Je suis aigrie sans doute, je pleure ce que j'ai espéré, mais c'est fini pour moi, ça non plus j'en peux plus. Le mot « concours » me fait hérisser les poils : se retrouver parqués comme du bétail, à répondre aux mêmes questions sottes, pour avoir ce qu'on espère que l'autre n'aura pas, me donne envie de gerber. Sans compter les minutes interminables d'attente dans des odeurs de stress à vomir. J'en ai bouffé jusqu'à l'écœurement.

3 commentaires:

  1. Intéressant, mais de - en - amusant..!

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    1. Aïe. Merci pour votre commentaire. Mais qui vous dit que je suis amusante... ? ;-)

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    2. Parfois tu l'es amusante; certes on pourrait préférer les termes d'auto-dérision et d'ironie, mais en l'occurrence mon commentaire ne faisait allusion qu'aux choix des réactions qu'il nous est possible de cocher au pied de ta prose, soit : "amusant", "intéressant" et/ou "passionnant", et c'est ce que je venais de lire qui avait inspiré ma remarque.

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