Si
c'était à refaire, je referais, dans le sens re-faire, recommencer
différemment. Je commencerais par être plus à l'écoute de mes
émotions. Je délaisserais mes cahiers, mes apprentissages, le
bourrage de crâne et la standardisation, et j'écrirais plus, je
vivrais plus, j'aimerais. Je suis passée à côté de tout ça. Je
croyais que pour être aimée et valable, il fallait que j'ai des
bonnes notes, que je sois la meilleure ou parmi les meilleures. Je me
suis trompée. Et je me suis enfoncée dans un océan de névroses,
d'angoisses, de dépersonnalisation. J'ai pas osé être moi par
peur, par conformation à l'avis des autres, par le besoin maladif
d'être comme tout le monde, fondue dans la masse, j'ai inhibé mes
émotions, je les ai étouffées, rentrées, torturées jusqu'à ce
que cela devienne un automatisme. L'automatisme du déni de soi, par
peur de décevoir, d'être rejetée. J'étais devenue un zombi. Mes
plus grandes inquiétudes étaient de ne pas savoir mes leçons, sans
voir que ma plus grande aurait dû être celle de me déposséder.
J'ai développé des troubles obsessionnels, comme des choses à
répéter cinquante mille fois pour être sûre de les savoir, des
gestes de réassurances en pagaille, des tocs. Petit à petit un mal
de vivre. Je me souviens qu'à l'âge de 9 ans, je rentrais du CE2
avec des questions existentielles plein la tête, et parmi elles, la
certitude de ne pas être heureuse plus tard si je continuais dans
cette voie. Chaque soir, travailler, je comptais les années
d'études, relativement au brillant parcours que l'on m'avait
imaginé, vu mes bonnes notes et mon sérieux. Et je voyais l'avenir
sombrement. À 9 ans !
Parce qu'au fond de moi, je ne voulais pas vivre cette vie-là. Mais
je ne voulais pas non plus décevoir mes parents. J'étais déjà
dans le dilemme le plus grand de l'existence humaine.
Alors
voilà. J'y suis arrivée au stade où je me rends compte que j'avais
raison, que la petite fille que j'étais avait déjà vu ce qui
allait se passer.
J'aurais
dû écrire à cette époque. J'aurais peut-être réussi à endiguer
ce côté dépressif dans quelque chose de créatif.
J'ai
donc compris de ces années, dans ma prison intérieure de la
réussite au prix de ma santé, qu'il fallait à tout prix accepter
de se laisser déstabiliser par ses émotions : accepter de
rougir, d'être gênée, de ne pas tout maîtriser et se foutre à
tout prix des paroles vexantes, venant des amis ou de la famille, qui
sont souvent des tentatives d'intimidation, soit pour comprendre
quelque chose qu'ils ne comprennent pas ou pour faire correspondre
quelqu'un ou une situation à l'idée qu'ils s'en font. Ne pas se
juger.
Actuellement,
j'hérite de tout ce que j'ai lentement mis en place tout au long de
ces années de l'évolution de l'enfant à l'adolescente puis à la
jeune adulte que j'étais.
J'ai
un intense besoin d'émotions et une peur panique de ces émotions.
J'ai vécu dans l'échec, puis dans l'immobilisme et dans la peur de
les accumuler encore. J'avais peur de ne pas être à la hauteur de ce
qu'on attendait de moi, aujourd'hui, on n'attend plus grand-chose de moi.
Mais tu es beaucoup trop dure envers toi même, cesse donc de t'autoflagéller constamment. Heureusement que tu n'es pas architecte parcequ'une personne comme toi dirait à chaque réunion:
RépondreSupprimer«_ il y a encore ceci à revoir».
Positive un peu, dis toi bien que tu vaux autant que les autres et même souvent plus que la plupart d'entre eux.
Tiens je retrouve ce commentaire auquel je n'avais pas répondu. Merci Obito. Oui, le perfectionnisme. Je m'en, suis détachée au fil du temps, comprenant que cela tournait à l'obsession chez moi.
SupprimerPositiver, se faire confiance, tu as tout à fait raison, ce sont les maîtres-mots.
Bises