Je
n'ai plus qu'à me pendre. Ou pas. Mais alors comment me débarrasser
de cette culpabilité, et de cette sensation d'être une merde qui a
raté sa vie ? Beaucoup se pendent pour moins que ça. Mais bon,
j'ai pas envie. Ça fait mal et ça blesse les gens qu'on aime et ça
résout pas le problème puisqu'on sait pas ce qu'il y a au bout du
tunnel (ptet qu'on retrouve ses problèmes ?) Bref. Va falloir que je
trouve mieux. J'ai fait le constat que j'étais devenue ce que
j'avais peur de devenir, c'est-à-dire, une fille perdue, une
chômeuse, qui n'a rien à faire, pas de responsabilités, qui
normalement au bout d'un certain temps se met à parler vulgairement,
le teint blafard, désabusée, et au bout d'un temps encore plus
certain, se trouve une addiction pour oublier. Bon sang, mais comment
j'ai pu en arriver là ?
Je
suis dans la dépression et pourtant, j'arrive pas à en être
vraiment consciente, ça me fait trop peur de mettre ce mot-là sur
mon état. Alors j'écris, j'écris, je lis, je lis…
espérant que peut-être le mouvement de mes mains sur le clavier, de
mes yeux sur les pages m'apportera quelque chose, mais ça aussi j'y
crois de moins en moins. J'ai peur que mes forces ne soient en phase
de rémission. Je sens l'appel du lit, qui me tend sa couette et ses
oreillers et qui voudrait que je me confie à ses soins, même en
plein milieu de la journée… « Viens, viens, je vais te faire
oublier tous tes tracas, je vais te détendre, tu n'auras pas à
penser, à ruminer… » C'est terrible. Tout ce que
j'entreprends devient difficile. De croiser des gens dans la rue
devient insupportable.
Je
programme des choses dans ma journée pour combler le vide, avoir
l'impression que j'avance un peu, mais c'est du vent, c'est de
l'occupationnel, rien n'a de cohérence, de sens dans ce que je fais.
C'est du remplissage, des coups de tête, je saisis les occasions de
faire quelque chose qui se présentent. L'essentiel est de « faire
quelque chose » pour ne pas succomber à l'appel de la couette.
Je
ne juge plus les déprimés, les rmistes, les gens qui se
marginalisent. C'est trop difficile à vivre, la descente est lente,
insidieuse et indolore. La remontée est encore plus lente mais
douloureuse comme pas possible, voire impossible. C'est ce que j'ai
peur de découvrir, que cette remontée est impossible. A l'aide !
Le
plus difficile, c'est de voir les amis devenir médecins, avoir des
enfants, des maisons, la comparaison toujours, se dire que si j'avais
été autrement… peut-être si j'avais fait autrement… et puis,
l'instinct de survie reprend le dessus, heureusement, la compassion
pour sa petite tête qui finira peut-être par sortir de l'eau, qui
aura appris plein de choses de cette galère… Oui, mais le temps
passe et la compassion finit par lasser.
Je
suis obligée de me bercer d'illusions pour tenir. L'illusion de
retrouver du travail, un travail dans lequel je serai bien,
l'illusion de me libérer de mes
chaînes, d'oublier mes tourments, de me remettre dans la course de
la vie, de sortir de ma torpeur, de mon cocon…
Ça
fait du bien les illusions, mais ça détruit aussi parce que plus
elles sont déçues, plus on les limite, moins on en a. On finit par
avoir la réalité devant les yeux et là, c'est le drame. Plus
d'illusions alors ! Vivre dans la réalité, accepter mes
faiblesses, ma condition, résultats de mes errements. Mais là,
c'est aussi le drame.
Il
faut agir, retrouver des forces, du courage, de l'estime.
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