Prologue ou Histoire de la fille qui ratait tout

Je ressens le besoin d'écrire mon histoire, de me raconter, comme si j'avais besoin des mots pour me sortir d'une impasse, d'un mal être, d'une incapacité à aller de l'avant. J'ai l'impression d'avoir fini un cycle, d'avoir bouclé une boucle, et d'en avoir saisi le mécanisme, de cette boucle, comme un système complexe et bien rodé dont on finit par percevoir le fonctionnement.

Et à trente ans – trente deux exactement – je crois que je peux le dire, j'en suis là, à ce moment de ma vie où je commence à comprendre mon fonctionnement. J'ai découvert qui j'étais : la fille qui rate tout.

dimanche 9 mars 2014

Charlotte

Ah je fais trop tièp' comme disent les djeun's. Je viens de parler à Charlotte en fermant mes volets. Charlotte a fait sa toile sur les barreaux du garde-corps de ma fenêtre. Peut-être vous ai-je déjà parlé d'elle… C'est mon "pet" comme disent les anglo-saxons. Mon animal familier quoi. (sinon ça veut rien dire on est d'accord.)
 
Charlotte ne doit son seul salut qu'à mon syndrome de solitude. En des temps ordinaires et plus cléments, elle aurait sans doute connu la marque de mes savates, admettant qu'elle en eût le temps, et de Charlotte - ou de ce qui serait resté à l'état de cri hystérique avec au mieux comme sobriquet (même si beaucoup moins glamour) "Espèce de sale bête !" ou "Putain d'araignée de merde !" - et de Charlotte donc, point d'histoire commune tissée (ah ah) au fil des jours…
 
La solitude de la Working class, c'est ça : fi des cris d'hystérie et des gestes irréparables à l'encontre du monde de l'infiniment petit. Pas de place dans le budget pour toutou, son Canigou et ses vaccins, alors on parle à l'oreille du taon ; on respecte le cafard, on glorifie la mouche, car on les voit, eux, si souvent oubliés, négligés et bafoués ; dans notre monde de l'immobilisme, le mouvement d'une aile de papillon, le bourdonnement d'un coléoptère, la lente progression du lombric sur la feuille du ficus prend une dimension sacrale, comme si toutes ces petites compagnies inattendues étaient envoyées par Dieu lui-même pour briser notre solitude.
 
Oui, Charlotte a sa place dans ma famille.
 
J'aimerais partager plus de choses avec elle, mais elle a un caractère difficile qui ne s'accomode pas de trop d'originalités. Alors je la laisse tranquille. Je lui dis bonjour le matin, bonne nuit le soir et parfois je lui permets de s'abriter à l'intérieur s'il pleut trop. Je n'ai pas encore fait de rond de serviette à son nom, mais peu s'en faut.
 
Fort de ce constat, je suis sortie ce week-end et je me suis enfilée deux Casse-tête et une Despe…

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