Ça va pas. Phrase qui
sonne comme le glas ; qui s'impose comme une évidence.
Aujourd'hui, ça va pas. « Ladies and gentlemen, l'humeur du
jour de la fille qui ratait tout, (puisque c'est à la mode) :
CA VA PAS ! » ((aparté) avez-vous déjà essayé
de vous plaindre par statut interposé, personne ne réagit.
Pourquoi ? Peut-être parce que si tu vas vraiment pas, tu vas
pas sur Facebook. C'est pas politiquement correct. Qui est pris au
sérieux quand il annonce qu'il va faire une connerie sur Facebook ?
À la base, internet,
c'est pas sérieux. (fin de l’aparté))
Donc ça va pas. Mais du coup, vous ne
me croyez plus. Donc ça va pas trop, quoi…
Bon oui ça va pas si mal, allez…
Ce qui ne va pas, c'est mon fonctionnement. Mais ce qui va, c'est que
j'ai la force de faire un pas de côté pour ne pas dramatiser et
essayer de soulever le capot pour examiner tout ça (je sors de la
voiture ou j'écris quoi).
La
mécanique fonctionne pourtant plutôt bien, voire trop bien, si bien
même que je deviens une automate. Et c'est ça qui va pas.
J'enchaîne les actions de la journée de façon machinale, mais sans
être là, comme si quelqu'un d'autre avait les commandes. Je roule,
je roule, je roule, mais ce n'est pas moi qui conduis. J'ai
l'impression que je n'habite plus mon corps, que mon esprit, que mon
âme s'est retranchée dans une aire bien cachée de mon cerveau pour
dormir peinarde. La Belle au bois dormant, imperturbable, côté
passager. Tout passe comme une brise légère qui ne trouble pas une
mer d'huile, ou pour rester dans la métaphore, comme un vent de
force trop faible pour déstabiliser le bolide, sans incidence, sans
influence. Je suis si loin de mes émotions qu'il me semble que je
pourrais endurer n'importe quelle nouvelle sans m'émouvoir.
Alors
je dois trouver des choses pour tenter de m'émouvoir, et me
rassurer…
et la valeur sûre, c'est : la bouffe !
Non,
pas les émissions de cuisine, ça ça ne me rassure pas, ça me fait
chier. Regarder quelqu'un t'expliquer comment faire cuire un œuf ou
couper un oignon me paraît une insulte à nos prétentions de
spectateurs éligibles à la redevance. Non, la vraie bouffe, bouffer
quoi !
Et
hier, l'obsession du jour fut de trouver un fondant au chocolat.
Mon
être en dormance avait scotché sur un moelleux au chocolat
dépassant le seuil de mes tickets-resto à la cafet' du centre de
formation où je passe la semaine, et une certaine discipline
budgétaire (dont je ne suis pas peu fière) ne se résolvait pas à
outrepasser mes droits en allongeant par quelques pièces sorties du
porte-monnaie.
Alors
ce fondant au chocolat me hanta toute l'après-midi, avec la
puissance décuplée de l'interdit qui rend la chose encore plus
désirée.
L'obsession
devint si forte que je cédai à la tentation. Sitôt sortie du
centre de formation, j'ai fait toutes les boulangeries de ma ville
pour trouver ce fondant au chocolat (ou à peu près le même), comme
si mon seul salut en dépendait. Malheureusement, je ne trouvai qu'un
« délice au chocolat » qui, avec le recul, ne dût pas
être aussi bon qu'aurait été le fondant de la cafet', mais bon.
Je
le coupai en deux (pour ne pas culpabiliser de m'envoyer les 500
calories d'un coup dans les parties molles de mon anatomie) et oui !
Le temps de son incorporation, j'étais réconciliée avec la vie,
délestée de mon incapacité à incarner mon être profond. Ma Belle
au bois dormant (et mangeant du coup) se tenait assise, sur le bord
de son lit (ou de sa voiture je ne sais plus), les yeux grand
ouverts, le temps que dure ce petit moment de félicité…
Tu dois vraiment être un petit bout de femme adorable, non ?
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