Prologue ou Histoire de la fille qui ratait tout

Je ressens le besoin d'écrire mon histoire, de me raconter, comme si j'avais besoin des mots pour me sortir d'une impasse, d'un mal être, d'une incapacité à aller de l'avant. J'ai l'impression d'avoir fini un cycle, d'avoir bouclé une boucle, et d'en avoir saisi le mécanisme, de cette boucle, comme un système complexe et bien rodé dont on finit par percevoir le fonctionnement.

Et à trente ans – trente deux exactement – je crois que je peux le dire, j'en suis là, à ce moment de ma vie où je commence à comprendre mon fonctionnement. J'ai découvert qui j'étais : la fille qui rate tout.

dimanche 20 janvier 2013

Je l'aurais suivi...

Je l'aurais suivi jusqu'à un coin tranquille du pavillon. Il aurait commencé par un :

– Bon voilà, on est plus tranquilles ici.

J'aurais souri, sans rien dire. Il aurait repris la parole pour ne pas laisser au silence le temps de s'installer.

– Bon, comme je te disais, tu sais, j'ai pas trop le temps en ce moment… Je dois me soigner et puis je vais partir d'ici. J'ai envie d'aller en province. Mais pour l'instant, je trouve pas de boulot… C'est compliqué tu comprends…

Alors j'aurais pu lui demander de quoi il devait se soigner, d'abord… et puis, ajouter que je comprenais… tout en détestant la sollicitude à laquelle il me forçait.

Le silence aurait quand même fini par s'installer.

J'aurais rejoué le coup de la culpabilité.

– Je suis désolée de t'avoir un peu accaparé avec mes mails et mes sms… J'espère que je t'ai pas trop soûlé…

Il aurait dit non, par politesse, pensant tout le contraire, ou bien peut-être pas… Dans mon rêve, il aurait dit que ça ne l'avait pas soûlé et même que ça l'avait flatté. Il aurait alors reposé cette question qui m'avait encouragée à poursuivre dans mon entreprise :

– M'en dirais-tu plus sur cette envie de me connaître davantage et cet élan qui t'a poussée à m'écrire ces messages… ?

Et là, au lieu de tourner autour du pot, de prendre mille et une précautions de trop, celles-là même qui avaient sûrement été à l'origine de cet effilochement du lien qui se tissait doucement entre nous, je lui en aurais dit plus sur cette envie…

– J'ai envie de toi, tout simplement.

Peut-être aurait-il eu un instant de surprise, ne s'attendant pas à un aveu aussi limpide.

Il m'aurait regardée, dans un léger plissement des yeux, histoire de sonder en moi la solidité de l'ancrage de mon aveu.

J'aurais soutenu son regard, le laissant voir en moi et y trouver ce qu'il voulait et j'aurais rougi, la pénétrance de ses prunelles claires chargeant chaque parcelle de mon être d'un désir incoercible.

Il aurait toussoté pour contrer le surgissement dangereux du silence.

J'aurais baissé les yeux, incertaine d'avoir bien fait d'être aussi limpide.

Et j'aurais senti ses doigts agripper mon menton, relever mon visage… Son regard aurait cherché le mien un instant et puis il se serait rapproché lentement… jusqu'à ce que nos lèvres se touchent. L'explosion des sens en moi m'aurait tout à coup transportée dans une autre dimension. Je me serais laissée aller à la caresse de son baiser, quémandeuse, implorante. Mon désir de lui aurait franchi le point de son apogée. Aurait-il alors tenté d'aller plus loin, me sentant si fébrile et excitée ? Aurait-il joué à me faire languir ? À me faire souffrir ?

 

1 commentaire:

  1. Tu écris : "Comme pour prolonger cet état de non-retour où le désir de jouissance devient besoin irrépressible, nous aurions savouré l'étreinte chaste encore quelques instants et puis l'appétit se faisant féroce, ses doigts auraient fait glisser ma culotte et son sexe se serait emparé du mien, humide et offert..."

    J'aime beaucoup ce passage du sentiment pur à la dimension concrète. Il y a quelque chose qui ressemble à une condensation...

    Vergilius

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